Depuis plusieurs mois, le monde entier est envahi par l’une des plus horribles menaces, la pandémie du coronavirus.
Dans ce contexte, l’option de suspendre les écoles a été préconisée dans presque partout, pour atténuer la propagation surtout chez les enfants.
Comme alternative, l’enseignement à distance (EAD) a été préconisé pour assurer la continuité pédagogique. A l’épreuve de la conjoncture, les effets ont ils mis en évidence la plus-value escomptée? Quels défis et opportunités pour un système d’enseignement résilient dans un contexte de mutations et de crises inéluctables? Quelles reformes pour enseigner et apprendre autrement?
A l’aube de la Covid19, les canaux que sont la télévision, la radio, les réseaux sociaux et les supports numériques de l’ordinateur et du smartphone, ont très tôt mis en vedette des initiatives de e-learning ou télé-enseignement. De nombreuses plateformes comme « apprendre à la maison « ), « salle des profs », « école à la télé » ect., ont suscité du coup beaucoup d’intérêt et d’espoir.
Cependant, malgré la densité des ressources proposées, des contraintes ont vite réduit la portée de l’EAD à cause des disparités dans l’accès à l’énergie, à la connectivité et aux rudiments technologiques. Cet état de fait a exposé davantage la fracture numérique révélant ainsi les limites sociales et géographiques. Qui plus est, sur le plan operationnel des défis se sont posés pour la couverture massive d’un programme pourtant si precieux, cumulés aux besoins de planification et d’harmonisation des progressions, sans compter l’exigence de dispositifs de pilotage, d’encadrement et d’évaluation et l’intangibilité de la relation enseignant-enseigné pour donner de l’âme à la continuité pedagogique. Aussi, la prise en charge prioritaire des classes d’examens dans le processus de réouverture a t’elle mis en évidence la nécessité de renforcer les capacités logistiques pour une prise en charge démographique des eleves et apprenants de tous les niveaux.
Toutefois, l’EAD s’est avéré etre un rempart inégalé à la fois de protection sanitaire et sociale dans ce contexte de crise mais aussi et surtout de continuité des enseignements. Sous ce registre, l’EAD offre une flexibilité d’apprentissage et une diversité de ressources numériques aux apprenants à la maison même si dans certaines conditions de précarité et de promiscuité cela peut ouvrir la voie à des menaces d’abus et de violences domestiques mal tolérées en milieu scolaire.
En plus, faut-il le mentionner, l’EAD offre la possibilité d’une couverture massive rendant ainsi plus aisée la gestion des effectifs sans compromettre grandement la prise en charge différenciée.
Cependant, contrairement aux idées reçues, l’EAD ne supprime pas la relation pédagogique, elle la maintient en réorganisant le rôle de l’enseignant desormais assisté par les technologies (web, tv, radio, ordinateur, tablettes, smartphones…). Pour ainsi dire l’EAD vient en complément et non en opposition de l’enseignement présentiel. D’où la nécessité de systématiser leur interdépendance.
En somme, que ce soit en situation de crise ou de post-crise, l’EAD ouvre de nouvelles horizons pour rendre le système éducatif plus performant et résilient face aux mutations et aux exigences d’équité territoriale. Dans cette perspective, des mesures prioritaires pourraient être mises à contribution pour renforcer les importants acquis comme celle de :
- rendre systématique de prime abord, l’utilisation des technologies nouvelles grâce à des stratégies hardies d’appropriation et d’intégration des innovations technopédagogiques partout et pour tous. Arriver à cette généralisation de l’accès, de la maîtrise et de l’utilisation des technologies de la communication appliquées à l’éducation (TICE) constitue la modalité principielle pour une resilience pédagogique ;
- Réaliser l’évaluation diagnostique des expériences et capacités institutionnelles et humaines pour initier des stratégies plus efficientes grâce à une capitalisation conséquente des leçons apprises et bonnes pratiques éprouvées;
- Démocratiser l’accès aux ressources, supports et outils pédagogiques numériques à tous les niveaux, prioritairement dans les zones rurales pour garantir la territorialité numérique et pédagogique;
- Developper le rôle des parents et la place du soutien parental cumulé avec l’introduction des langues nationales et l’orientation du role des parents d’élèves en tant que relais pédagogiques dans le suivi à domicile;
- Developper des programmes structurés adossés à des planifications appropriées, basés sur des contenus harmonisés et encadrés par des systèmes d’évaluation adaptés;
- Donner une place centrale à la formation des enseignants et assurer leur autonomie à développer des ressources ce qui va garantir une efficacité et une interactivité nécessaire en présentiel comme en distanciel;
- Équiper et renforcer les capacités des administrations scolaires dans le management, le suivi et l’évaluation des enseignements-apprentissages;
- Renforcer la décentralisation et la déconcentration avec une responsabilité affirmée des collectivités territoriales dans la définition et la mise en œuvre des politiques publiques d’éducation et de formation. Dans cette logique, les administrations scolaires devraient etre renforcées et soutenues pour jouer pleinement leurs roles de référence et de responsabilité dans la prise en charge technique et pédagogique des standards et des spécificités.
De ce qui precede, il ressort que les défis sont énormes et les enjeux très stratégiques, mais l’intangibilité des principes de qualité, d’inclusion et d’équité donnent un champ opératoire tres ouvert aux diverses modalités et alternatives d’enseignement-apprentissages. Pourvu qu’elles convergent toutes vers une approche duale, voire hybride, complémentaire ou concomitante dans le respect des normes et des pratiques institutionnalisées. Durant toute la période de crise ou de post-crise aucune alternative ne doit être laissée pour compte.
Malang Mané, citoyen.