Ousmane Diao professeur d’anglais et militant du parti démocratique sénégalais fait une lecture de la situation entre les deux pays : une renaissance de l’économie locale.
Quelle lecture faites-vous du blocus entre ces deux pays ?
Depuis plusieurs semaines, les frontières sénégalo-gambiennes sont fermées. Du coup l’économie de nos voisins anglophones est entrain d’en faire les frais. Mais qu’en est-il de l’Economie Sénégalaise? » Nous pensons qu’il faut avoir une approche participative et patriotique affirme-t-il.
La Participation à l’Economie locale, un Nouveau devoir pour l' » Homo Senegalensis» et un Acte Patriotique.
» Si l’activité des sénégalais du sud du pays (Casamance) qui s’est accrue de manière exponentielle peut constituer une preuve palpable, alors nous pouvons affirmer sans risque de se tromper que notre économie n’est nullement ébranlée par le blocus. Tout au contraire, elle se sent très bien plus que jamais. Désormais, le petit commerce marche au plaisir général des populations à l’intérieur du pays notamment sur l’axe Ziguinchor Kolda en passant par Sedhiou.
En effet, l’une des conséquences directes du blocus opérés sur les frontières sénégalo-gambiennes, c’est la nouvelle tendance commerciale remarquée dans cette partie du pays. A présent, des milliers de familles développent un petit commerce fructifiant qui a augmenté plus ou moins leurs pouvoirs d’achat. Ceci prouve que l’emprunt de la transgambienne constituait un facteur qui laissait en rade la petite économie locale au profit de l’économie étrangère. Outre cette nouvelle tendance économique, la desserte maritime Dakar-Ziguinchor enregistre ses meilleurs profits du fait de la forte demande. Au-delà de l’aspect économique, ce blocus peut aussi être un propulseur du tourisme local. En empruntant le contournement, les voyageurs sénégalais et étrangers découvrent l’intérieur du pays notamment les régions de Kolda, Sedhiou, Tambacounda et Kaffrine sans compter le paysage éblouissant qu’ils voient apparaitre de part et d’autre tout au long du trajet. Cela étant dit, l’ « Homo Senegalensis» doit d’une part s’attribuer de nouveaux devoirs comme le veut la nouvelle constitution de notre république, d’autre part rendre la notion du patriotisme économique effective par l’emprunt du contournement soutient-il.
Pensez-vous que le contournement ne présente-t-il pas des paradoxes pour les voyageurs ?
» Oui souligne-t-il, » Car, il est nécessaire de concilier cette notion à la construction nationale, non pas en laissant en rade la petite économie locale au profit d’une économie étrangère sans rendement pour les populations de cette partie du pays.
L’observateur avisé ne saurait faire l’apologie du » contournement national en faisant fi de ce désagrément de taille qu’est le temps de voyage que constitue l’axe Dakar-Sénégal oriental-Casamance naturelle. Il est vrai que force est de constater que ce périple ressemble plus à un parcours du combattant tant l’état des routes à certains égards (bien qu’on note des améliorations sur cet axe) nous requinque sur cet éternel sentiment d’oubli de la part des différents locataires de la bâtisse de la rue de la République. Le jeu n’en vaut-il pas la chandelle ? Pour s’en convaincre, il suffit de faire un détour dans ces localités et chez ces populations pour qui ce blocus constitue plus une bouffée d’oxygène sur le plan économique qu’un long et harassant cauchemar dont certains ont hâte de se réveiller.
D’ailleurs, il apparait opportun d’attirer l’attention de nos dirigeants sur la nécessité de réfléchir sur la faisabilité et les modalités de mise en œuvre d’un véritable projet structurant et innovant qui permettra de faire du contournement de la Gambie un quotidien pour ces populations du Sud et la majorité des Sénégalais conscient des potentialités de la zone et épris de justice et d’équité démocratique et sociale, pour qui la résolution de ce casse-tête est plus urgent qu’une autoroute qui ne sera empruntée que 72 heures durant toute l’année défend-il.
Croyez-vous que le sentiment patriotique doit être au dessus des vertus politiques ?
» la notion du patriotisme économique ne saurait être effective que si les gouvernements sénégalais mettaient en place des politiques dans le sens d’encourager, de soutenir et d’accompagner les initiatives audacieuses qui permettraient de mettre fin à cette marginalisation des autochtones non liés au capital étranger et qui essaient tant bien que mal à joindre les deux bouts. Comme l’affirmait Louis Kossuth » le patriotisme est la source du sacrifice, par cette seule raison qu’il ne compte sur aucune reconnaissance quand il fait son devoir. Nous devons accomplir notre devoir patriotique en saisissant cette opportunité. Rouler dans le pays, c’est connaitre le pays, c’est aussi participer à la construction nationale et affirmer notre patriotisme qui est aussi notre engagement à faire de la notion de ce concept un symbole pour tout une nation. Même si une solution pointerait du nez pour lever le blocus, nous devons militer pour l’emprunt du contournement si nous sommes des patriotes croit-il.
Mahmoud Diallo
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Source:setal