jeudi, avril 25, 2024

Pénurie d’eau à Dakar : le PS Disqualifie le régime actuel et l’invite à définir des voies et moyens pour conjurer pareille situation

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Pénurie d’eau potable, inédite par son ampleur, dans presque toute la région de Dakar, et par sa durée, plus de deux semaines, a fortement éprouvé les populations qui, malgré des désagréments insupportables, ont fait preuve d’une grande dignité. Le Bureau politique du Parti Socialiste a rendu publique une déclaration pour faire l’état de lieux de la politique hydraulique au Sénégal.

« Le Parti socialiste salue la responsabilité des populations de Dakar qui ont refusé de suivre les pyromanes dans leur rêve fou de mettre le feu dans le pays et se réjouit de l’élan de solidarité de nos compatriotes qui les ont soutenues dans cette dure épreuve. Le Parti socialiste salue également l’engagement déterminé du Chef de l’Etat et du Gouvernement qui en ont fait un problème d’Etat en vue de lui apporter des solutions dans les court, moyen et long termes.
Cette situation dramatique appelait à une conduite décente pour ne pas faire écho au tumulte des voix opportunistes qui s’illustraient dans une surenchère de discours démagogiques ou idéologiques. Aujourd’hui dégagée de toute passion, dans la sérénité, cette situation inacceptable doit être analysée avec minutie pour révéler ses causes exactes et les responsabilités à tous les échelons.

La panne, survenue le 12 septembre 2013 sur la connexion des conduites DN1200 et DN800 de l’usine de Keur Momar Sarr, résulte vraisemblablement d’un incident d’exploitation provoqué soit par un « coup de bélier » sur le système de pompage, soit par corrosion de la pièce en cause pouvant résulter soit de la qualité de l’eau traitée, soit enfin par l’agressivité du sol ou par contact entre deux métaux différents (Acier/Fonte) du fait de l’absence de joints isolants. Sans préjuger des résultats de l’audit technique des installations de Keur Momar Sarr, audit dont les termes de référence devraient être suffisamment précis pour identifier les causes et les responsabilités, le Parti socialiste invite l’Etat à préciser en amont les éléments consubstantiels à tout avenant avec la SDE, pour exiger à cette société de s’investir davantage dans la gestion technique des infrastructures à lui confiées, autant qu’elle le fait dans la gestion commerciale. Dans cette optique, la SONES doit exercer plus efficacement son rôle dans le contrôle de l’exploitation en procédant, hors de toute routine inhibitrice, à des inspections techniques périodiques et à un audit technique tous les trois ans conformément au contrat d’affermage.

Au-delà des responsabilités techniques, cette pénurie d’eau met en évidence une succession de fautes imputables au régime d’Abdoulaye Wade. Il faut se souvenir que l’incident du 12 septembre 2013 est le cinquième du genre depuis la mise en service des installations en décembre 2004, après un premier incident intervenu en 2009. De toute évidence, ces incidents récurrents mettent en cause la qualité de la pièce à l’origine de l’incident livrée par l’entreprise adjudicataire et qui présente des vices moins de dix ans après sa réalisation. Or, la garantie décennale n’a pas été utilisée pour obliger l’entreprise à honorer sa responsabilité telle que prévu dans le contrat.

L’autre faute inexcusable porte sur l’attitude pour le moins curieuse du précédent régime qui non seulement ne s’est pas opposé au retrait du partenaire stratégique, la SAUR, qui a cédé ses actions dans la SDE à FINAGESTION mais a apparemment cautionné cette cession réalisée contre les objectifs visés dans le contrat d’affermage. Cette transaction installe dans le capital de la SDE un gestionnaire de fonds d’investissement plus préoccupé par le gain à la place du partenaire technique stratégique choisi pour son expérience dans la gestion de l’eau, expérience qui aurait été utile en de pareilles circonstances, pour éviter ou réparer moins chaotiquement une telle panne.

En définitive, cette série de fautes disqualifie l’ancien régime et tous ceux qui, parmi ses tenants, tentent de récupérer cette affaire pour se faire une virginité. Inversement, elle exonère le pouvoir actuel dont la responsabilité ne peut être mise en jeu, ni même être recherchée sauf à engager contre lui un procès d’intention qui ne peut pas prospérer devant le tribunal d’une opinion publique avisée.

La responsabilité de cette pénurie ne peut non plus être imputée aux choix structurels réalisés dans le passé. Conscient à l’époque comme c’est encore le cas aujourd’hui que la maîtrise de l’eau constitue à la fois un enjeu national et un défi permanent, le Parti socialiste au pouvoir avait engagé une véritable politique de mobilisation des ressources en eau et d’amélioration du service public de l’eau potable en adoptant une stratégie de « transfert des ressources en eau des zones excédentaires vers les zones déficitaires ».

C’est ainsi que pour la région de Dakar, après l’exploitation continue pendant des décennies de la « nappe infra basaltique » et la « nappe des sables de Thiaroye » avec des risques forts de salinisation des nappes, les pouvoirs publics ont orienté l’exploitation les ressources en eau les plus proches et situées à l’Est, avec la nappe des calcaires de Sébikotane en 1961 et la nappe des calcaires de Pout en 1963. Tenant compte des limites de cette option consistant à exploiter les nappes souterraines, ils ont engagé le défi majeur de disposer pour la région de Dakar de ressources en eau pérennes avec le fleuve Sénégal et son défluent qu’est le lac de Guiers. Cette initiative avait permis de mobiliser 35 000 m3 d’eau potable par jour pour Dakar et en même temps de contribuer à l’amélioration de l’alimentation en eau des centres urbains que sont : Louga ; Ndande, Kelle, Mecké, Tivaouane et quelque 250 villages situés sur la parcours de la conduite du lac de Guiers reliant l’usine installée à Ngnith et les grands réservoirs de stockage de Thiès.

Avec la sécheresse de 1973 qui va complètement assécher le Lac de Guiers, les pouvoirs publics portés par la même vision vont, à travers l’OMVS (Organisation de la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal), accélérer la construction du barrage de Diama dont l’une des fonctions essentielles est de limiter les pertes d’eau douce vers la mer et de favoriser le remplissage « permanent » du Lac de Guiers. Avec cette nouvelle donne, la stratégie de «transfert des ressources en eau des zones excédentaires vers les zones déficitaires » va se poursuivre en exploitant au maximum la capacité de transfert de la conduite du Lac de Guiers et en réalisant l’exploitation des ressources souterraines de la « Nappe du Littoral Nord » entre Mecké et Kelle à partir de 1973, de la « Nappe du Maestrichtien » à Pout Kirène, Pout Nord et Pout Sud à partir de 1976.

Malgré les mesures entreprises, le déséquilibre entre l’offre et la demande s’est rapidement aggravé pour la ville de Dakar et sa banlieue en raison de l’atteinte des limites d’exploitation admissibles des nappes d’eau souterraines locales et de la saturation du transit des grandes adductions d’eau. Le développement de Dakar et de sa région va amener les pouvoirs publics à entreprendre de gros investissements à travers le Projet Sectoriel Eau (PSE) accompagné d’une réforme institutionnelle du secteur de l’hydraulique urbaine. Le Projet Sectoriel Eau comprenait plusieurs phases :

– une phase d’urgence (1989-1997) pour accroître de plus de moitié la capacité de traitement de l’usine de Ngnith (de 40.000 m3 à 64.000 m3) et réduire le déficit de l’alimentation en eau potable de Dakar, améliorer l’alimentation en eau potable de six centres fluviaux dans le nord du pays, renforcer l’alimentation en eau potable de 8 centres de l’intérieur, étendre et améliorer l’alimentation en eau potable de la Petite Côte ;
– une phase intérimaire visant le renforcement de l’alimentation en eau potable de Dakar par le doublement de l’adduction d’eau provenant du lac de Guiers, le renforcement de la station de traitement de Ngnith, la construction de forages et de piézomètres, l’augmentation de la capacité de stockage à Dakar, le renouvellement de canalisations de distribution et l’extension du réseau dans les quartiers périphériques, la réalisation de branchements sociaux et de bornes-fontaines, et le développement de la télégestion des installations ;

– Une phase à long terme dit « Projet Eau Long Terme » qui se déclinait d’abord par la construction envisagée d’une voie d’eau à ciel ouvert (projet Canal du Cayor) qui avait l’ambition de répondre à la demande de transfert d’eau brute sur une durée de 40 ans. Ensuite, pour des problèmes de délais de financement, cette option fut relayée par une formule de conduite enterrée reliant l’Adduction du Lac de Guiers (ALG) de Guéoul à la seconde usine à réaliser à Keur Momar Sarr avec 65000m3/jour en 1ère phase et une autre tranche de 70000m3/jour en seconde phase (2004). En tout état de cause, un nouveau programme aurait dû être préparé et lancé avant la fin de l’’horizon 2010 compte tenu de la croissance urbaine de la capitale et de l’horizon décennal de saturation des conduites.

Au total, la mise en œuvre du Projet Sectoriel Eau a permis de porter le taux d’accès à l’eau potable dans les centres urbains à 99,6%.
Dans le même temps, la réforme institutionnelle, mise en œuvre à partir du mois d’avril 1996 et exemplaire à tous points de vue à telle enseigne qu’elle a été reprise dans la plupart des pays africains, a permis de promouvoir la participation d’un opérateur privé dans l’exploitation du service public d’eau potable, et de mieux répartir les missions du secteur de l’hydraulique urbaine entre les acteurs (SONES, Collectivités locales, Usagers et Secteur privé). Le contrat d’affermage avec la SDE, dont le capital est détenu par l’Etat du Sénégal, le personnel et le secteur privé national, fait suite à ce choix stratégique de confier à un opérateur privé l’exploitation technique et commerciale de l’eau. C’est dans ce cadre que le capital de la SDE a été ouvert à la SAUR, spécialisée dans la gestion technique et commerciale de système d’approvisionnement en eau des grands centres urbains, à la suite d’un appel d’offres où ont également soumissionnées la Générale des Eaux, la Lyonnaise des eaux et la CISE.

En outre, l’incident du 12 septembre offre l’occasion d’engager, non pas un débat idéologique sur la nationalisation du secteur de l’eau comme certains ont cru devoir l’exiger dans un souverainisme débridé, mais sur les stratégies à mettre en perspective pour la mobilisation des ressources en eau pour la région de Dakar et les autres localités du pays.

Ces stratégies doivent privilégier les solutions structurelles, de type Canal du Cayor, qui permettent de compenser le déficit actuel et de garantir un approvisionnement continu de l’eau à très long terme. Aussi, si la construction d’une station de dessalement d’eau de mer a pu être envisagée comme une option, il reste à maitriser d’une part les risques environnementaux qui y sont attachés, notamment le rejet de l’eau salée dans la faune et la flore et d’autre part, le coût énergétique des technologies utilisées, à savoir la distillation ou l’osmose inverse, qui sont de grandes consommatrices d’énergies dans un pays déjà confronté à un déficit dans ce domaine.

En effet, les pays qui ont opté pour cette technologie sont le plus souvent producteurs de pétrole ou de gaz et disposent, à ce titre, d’une « énergie bon marché ». Il faut craindre que la mise en œuvre de cette solution n’affecte la tarification, hypothèse plausible si la société d’exploitation répercute sur les factures le coût de revient du m3 qui dépasse largement celui d’un forage ou d’une station de traitement d’eau de surface dans une proportion de l’ordre du triple ou du quadruple si l’on se fie aux données existantes. Il va sans dire qu’une telle étude stratégique ne peut être menée valablement que par l’Etat sous l’égide de la SONES.

Par ailleurs, notre pays devrait garder sa stratégie de collecte des eaux de ruissellement par la création de barrages collinaires et de retenues d’eau, au besoin en développant une nouvelle approche et en l’approfondissent avec la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau qui a réalisé plusieurs études et identifié de nouveaux sites. En tout état de cause, il importe d’engager les études et les moyens utiles à la consolidation du secteur de l’hydraulique urbaine au Sénégal, en renforçant les acquis et en ouvrant des perspectives innovantes et durables.

Enfin, le Parti socialiste soutient vivement le Gouvernement et l’exhorte avec l’ensemble des citoyens, à tirer tous les enseignements utiles de cet incident grave qui a éprouvé, sans faire plier, la solidarité nationale et le moral de la Nation mais aussi à définir, pour l’avenir, les voies et moyens de conjurer, avec moins de risques, des situations semblables ».

Ferloo

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