jeudi, juillet 10, 2025

La « tyrannie » de la maigreur persiste dans la mode

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« C’est la mode, chĂ©rie, tu n’as qu’Ă  perdre du poids »: malgrĂ© l’apparition de mannequins rondes sur les podiums, l’injonction Ă  la maigreur reste omniprĂ©sente dans le secteur de la mode, oĂą les vĂŞtements sont dessinĂ©s pour des corps ultra-minces.

Les mannequins plantureuses, qu’on voit plus Ă  New York et Ă  Londres, mais aussi au compte-gouttes Ă  Paris, visent Ă  « montrer que la marque est inclusive », mais « en fait il s’agit de prĂ©server un système basĂ© sur la tyrannie de l’idĂ©al mince », affirme Ă  l’AFP Paolo VolontĂ©, qui enseigne la sociologie de la mode Ă  Milan (Italie).

L’Ă©chec en matière de diversitĂ© des morphologies est total, selon les donnĂ©es collectĂ©es par Vogue Business pendant la prĂ©cĂ©dente saison des semaines du prĂŞt-Ă -porter.

Sur 9.137 tenues dévoilées au cours de 219 défilés à New York, Londres, Milan et Paris, 95,6% ont été présentées par des mannequins minces (tailles 32-36). Seulement 0,6% ont concerné des mannequins grande taille (44 et plus) et 3,8% des mannequins avec une taille comprise entre 38 et 42.

Le marques « refusent de reprĂ©senter les personnes normales », rĂ©sume Ekaterina Ozhiganova, 31 ans, mannequin, Ă©tudiante en droit et fondatrice de l’association « Model Law » qui dĂ©fend les droits des mannequins.

– Difficile Ă  verbaliser –

Avoir la taille M, la plus rĂ©pandue dans la vie courante, est une aberration dans la mode: « on va leur proposer soit de maigrir pour revenir Ă  la +vraie+ taille, soit de basculer sur XL. Ni l’un ni l’autre n’est sain », ajoute-t-elle, Ă  l’AFP.

SollicitĂ©e par la dĂ©lĂ©gation des droits de femmes au SĂ©nat français en avril, elle a tirĂ© la sonnette d’alarme sur les risques pour la santĂ© des mannequins, contraintes de maigrir ou grossir Ă  la demande.

Neuf mannequins sur dix ont répondu ressentir une pression pour modifier leur apparence « régulièrement » (52,5%) ou « occasionnellement » (37,7%), selon un sondage inédit mené avant ces auditions.

« C’est très difficile de verbaliser. Tu peux te plaindre sur internet et tout le monde va te rĂ©pondre +ChĂ©rie, c’est le mĂ©tier+ », affirme Ekaterina Ozhiganova.

Des textes ont pourtant Ă©tĂ© adoptĂ©s en 2017 en introduisant un certificat mĂ©dical obligatoire pour les mannequins, tandis que les gĂ©ants du luxe LVMH et Kering ont signĂ© la mĂŞme annĂ©e la charte s’engageant Ă  supprimer de leurs demandes de casting la taille 32. Des mesures peu suivies d’effet.

– « Effacement du genre » –

L’interdiction du 32 ne veut pas dire grand chose, rĂ©agit Ekaterina Ozhiganova, car les tailles varient en fonction des maisons et les vĂŞtements du 34 peuvent tailler petit…

Les canons de beautĂ© masculine ont Ă©galement changĂ©. Hermès rĂ©alise ainsi pour les dĂ©filĂ©s les vĂŞtements en taille 48, a rĂ©cemment racontĂ© VĂ©ronique Nichanian, styliste des collections homme depuis 35 ans. « Quand j’ai commencĂ© dans la mode, la taille mannequin Ă©tait 52 (…) La norme sexy Ă  l’époque, c’Ă©tait le beach boy musclĂ©! », a-t-elle soulignĂ© au quotidien LibĂ©ration.

C’est l’esthĂ©tique de « l’effacement du genre » qui fait que les crĂ©ateurs « veulent une espèce de corps similaire », analyse Ekaterina Ozhiganova.

Pour Paolo VolontĂ©, il est plus facile de produire Ă  l’Ă©chelle industrielle pour des corps minces et plats.

« La technique de notation par taille signifie que vous commencez avec une taille zĂ©ro et que vous progressez Ă  l’aide d’un algorithme. Mais cela ne fonctionne pas pour les grandes tailles, car la graisse et les muscles » n’obĂ©issent pas Ă  l’algorithme, souligne-t-il. « Il est beaucoup plus coĂ»teux de produire et de vendre des vĂŞtements dans des tailles plus grandes, cela nĂ©cessite beaucoup plus de savoir-faire. »

« D’un point de vue industriel, on ne peut pas produire une robe grande taille », confirme Ă  l’AFP le couturier saoudien Mohammed Ashi, rĂ©cusant toute « discrimination ».

Et la haute couture avec son principe de sur-mesure s’en sort mieux, souligne le couturier français Julien FourniĂ© qui a, par exemple, fait dĂ©filĂ© des femmes enceintes. Sa mannequin fĂ©tiche Michaela Tomanova a un corps de femme et « six centimètres partout plus que les autres ».

Mais « la mode reste la mode », « c’est un monde fantasmé » et « cela ne changera jamais en profondeur », conclut-il.

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