Il est accusé d’avoir semé l’effroi dans la forêt de Sénart (Essonne) entre 1995 et 2000, en violant ou agressant sexuellement une trentaine de femmes: le parquet a requis mercredi vingt ans de prison contre Aïssa Z., père de famille de 45 ans.
Dans ses réquisitions devant la cour d’assises de l’Essonne, l’avocat général Marc Mulet a assuré s’appuyer sur des « éléments purement scientifiques », fondés en particulier sur la découverte de l’empreinte ADN de l’accusé sur la moitié des victimes. « Face à l’ADN, il y a très peu de possibilités de s’en sortir », a-t-il affirmé, réclamant contre l’accusé la peine maximale encourue.
La défense a, elle, plaidé l’acquittement et appelé les jurés à une vigilance accrue face à « cette preuve (…) qu’on délègue à un expert »: « L’ADN a tout pour lui, il n’a pas d’état d’âme et, entre nous, ne nous décharge-t-il pas un peu de cette responsabilité énorme qui est de décider du sort d’un homme ? », a demandé Me Cloé Fonteix.
Tout au long de son procès débuté le 15 septembre, l’accusé a catégoriquement réfuté être celui qui, coiffé d’un casque intégral de moto à visière fumée, a agressé pendant cinq ans joggeuses et promeneuses sur les chemins de cette forêt de l’Essonne, située à 25km au sud-est de Paris.
L’ancien chauffeur de bus a, à plusieurs reprises, crié à « l’erreur sur la personne ».
Un seul agresseur ?
L’enquête sur le « violeur de la forêt de Sénart », comme l’a surnommé la presse, a longtemps piétiné faute d’éléments probants. Elle a même été close une première fois en 2005. Mais de nouvelles techniques d’analyse d’ADN ont conduit fin 2015 à l’arrestation d’Aïssa Z.
Sauf que ces analyses auraient, selon Me Fonteix, été réalisées avec « subjectivité » et une idée préétablie : celle de penser qu’il n’y avait qu’un seul agresseur. « On a pu s’enfoncer dans une erreur », a avancé l’avocate, critiquant notamment les conditions de conservation de certaines pièces clefs, comme un préservatif.
Outre l’ADN, l’avocat général a nourri sa réquisition de 4h30 de témoignages des autres victimes pour lesquels les policiers n’ont pas retrouvé d’empreintes.
Un même modus operandi: il agresse sexuellement pour éviter les moqueries
« C’est un faisceau d’indices. Ce n’est pas un seul élément, ce n’est pas que l’ADN : en dehors de l’ADN, on a tout le reste », a affirmé Marc Mulet, soulignant des similitudes sur le mode opératoire comme sur la description physique de l’agresseur. « C’est quelqu’un qui arrive en cyclomoteur, qui simule une panne, qui attrape (la femme) toujours par derrière, qui demande un acte sexuel en menaçant, qui se masturbe sur elle, qui n’a pas d’érection, puis qui éjacule très rapidement« , a-t-il énuméré, insistant longuement sur le « micro-pénis » décrit par des victimes.
Selon l’avocat général, c’est là « le ressort psychologique de l’histoire » : l’agresseur aurait cherché dans les allées boisées de Sénart « des objets sexuels pour assouvir des pulsions sexuelles », sans s’exposer à des moqueries du fait de la taille de son sexe.
Et de rappeler que l’accusé a refusé de se soumettre à un examen médical, signe supplémentaire, selon lui, de sa culpabilité.
« Finalement, monsieur l’avocat général, c’est vous qui relativisez le plus cet ADN« , a rétorqué Me Fonteix. Son autre avocat Gabriel Dumenil a, lui, estimé qu’un tel examen serait, quel qu’en soit le résultat, « retenu à charge » contre son client.
L’avocat général a par ailleurs inclus dans ses réquisitions des témoignages examinés pendant l’enquête mais non retenus au terme de l’instruction. De quoi indigner Me Dumenil : « C’est inique ! Il n’est pas renvoyé (aux assises, ndlr) pour ces faits-là ».
Dans son box, l’accusé, cheveux ras, lunettes fines et masque sur la bouche, est resté impassible.
Verdict attendu à la fin de la semaine.