Evènements des motos Jakarta à Kolda : Le « Mieux d’Etat » : une nécessité pour le Fouladou (par Moussa Thior)

Les évènements survenus récemment à Kolda, notre très chère  ville d’adoption pour y avoir démarré nos carrières professionnelles dans le journalisme et l’éducation, nous ont poussés à une certaine analyse des changements que l’Etat  et ses représentants devraient  opérer dans son mode de perception et de traitement des populations. D’emblée ,sachant que les spécialistes de l’amalgame sont à l’affut pour jouer leur partition, je voudrais préciser que loin de moi l’idée d’encourager la violence et la destruction de biens et d’édifices publics, un bon citoyen ne doit pas agir de la sorte, et nous regrettons ces évènements d’un côté, les destructions et de l’autre les deux blessés.

Cela dit, pour avoir servi dans cette localité pendant plusieurs années et partageant désormais tous leurs évènements, heureux et malheureux nous ne pouvons manquer de rappeler un certain  nombre de faits :

D’abord posons-nous la question de savoir pourquoi ce type d’évènements ne surviennent que dans ces localités périphériques : Kolda, Kédougou, Medina yero foulah, Vélingara et j’en passe.

-D’abord, les fonctionnaires affectés dans ces localités doivent cesser d’avoir à l’esprit que leur affectation dans ces localités est synonyme de sanction ou de malchance et de cesser de se comparer à leurs collègues de Dakar, ou de Thiès qui  pensent-ils, ont beaucoup plus d’avantages, et lesquels ?

Un fonctionnaire peut bien se donner des défis professionnels et s’épanouir à Kolda si on apprend à vivre avec et comme les populations qui sont d’une sympathie débordanteet d’une générosité inégalée si on les respecte. Le koldois est entier, il ne triche pas.

-Ensuite l’Etat devrait mettre dans la tête de ces fonctionnaires qu’autant ils peuvent et doivent servir àThiès autant ils peuvent et doivent servir à Bantacountouyel, avec comme seule mission servir l’Etat en toute neutralité  et en toute impartialité. On se rappelle du passage de ce Ministre de la Santé des années 2000 qui promettait à tout gynécologue qui accepterait de venir servir à KOLDA de recevoir une indemnité de 700000 en dehors de son salaire, et du coup le service de gynécologie de l’hôpitalrégional de Kolda fermé depuis des années a reçu un gynécologue quelques jours après l’annonce du Ministre. Cetétat de fait venant d’un Ministre de la république a deux conséquences :le fonctionnaire considère qu’il doit avoir des avantages supplémentaires en acceptant de venir servir dans une localité aussi éloignée que Kolda pour compenser les « avantages  » qu’il a laissé derrière tels que les heures de garde bien rémunérés dans les cliniques privées de Dakar ou les heures d’enseignements dans les cours particuliers ou les écoles privées de Dakar ou l’heure d’enseignement est mieux payée oubliant que travailler pour l’Etat est un choix, une vocation et un amour de servir son pays.

Bref les appareils d’Etat qu’ils soient idéologiques à l’image des enseignants ou répressifs tels que les forces de l’ordre doivent d’abord se dire que ces localités méritentmême que le fonctionnaire fassent plus que sa mission ,une sorte de discrimination positive de la part de ces représentants de l’Etat en termes de missions à accomplir et non y installer la terreur et la violence .

J’avais l’habitude dire à mon éminent proviseur Boubacar Kandé et aux collègues de cesser de favoriser le renvoi des élèves et de chercher d’autres solutions pour récupérer ces élèves avec un faible niveau car je ne pouvais imaginer que dans une région comme Kolda, ou il n’y a pas les usines de DAKAR KAOLACK ET THIES, unerégion comme Kolda ou à l’époque il n’y’avait pas autant d’écolesprivées, qu’on renvoyait systématiquement les éléves,je me disais toujours s’ils sont renvoyés ils iront ou ?Dans le même contexte je me pose aussi la question de savoir si ce phénomène des Jakarta est malmené à Kolda ou iront ces jeunes qui s’y activent.

Au moment où l’Etat fait de son mieux pour freiner l’émigration clandestine, si ce phénomène des Jakarta disparait de Kolda que deviendront ces centaines de jeunes qui s’y adonnent pour nourrir leurs familles et échapper au desoeuvrement.Ces jeunes ont besoin d’être encadrés ,formés à la sécuritéroutière et voir même financés car en conduisant les motos ils ne prennent pas les routes de la Lybie ou du Maroc. Ils’y ajoute que ce phénomène des motos Jakarta est déjà pratiquéàKaolack depuis les années 90 avec les motos p 50 et même s’il y’a eu des heurts entre les conducteurs et les policiers municipaux concernant la taxe à payer la violence n’a jamais atteint ce degré. Ce qui nous pousse aussi à demander aux jeunes de Kolda de ne pas faire de la destruction des édifices publics leur sport favori. On a l’impression que dans ces villes dès qu’on a un problème avec un agent du service public la destination principale c’est soit le tresor,la police, entre autres oubliant que ces services ne doivent pas êtreconsidérés comme appartenant à l’Etat mais plutôt aux usagers car mis en place par l’Etat qui y a affecté des agents pour régler les problèmes des usagers dans leurs vie quotidienne. Que les jeunes de Kolda ne doivent pas surpris si les agents du trésor n’arrivent pas à traiter les dossiers de déplacement aux examens de leurs professeurs et que ces derniers finissent par bouder les classes car ce serait une conséquencelogique. Degrâce, un peu de retenue de la part de ces jeunes, changez de méthode de protestation. La liberté d’expression est garantie dans notre pays, utilisez cet outil, alertez l’opinion, investissez les medias, allez rencontrer le gouverneur, le préfet, les autorités coutumières et religieuses tel que l’archevêque Bassene, ils vous écouteront et prendront leur bâton de pèlerin et une solution sera trouvée.

Déjà la Préfecture de Vélingara  a dépoussiéré l’arrêté n°008903/MIT/DTR du 29/10/2012 de Monsieur le Ministre des Infrastructures et des Transports, portant réglementation des vélos taxis communément appelés motos Jakarta. Pourquoi attendre les évènements de Kolda pour demander aux services compétents de passer à l’application stricte d’un arrêté qui date de 2012, si les instructions du Ministre avaient été respectés, peut-être on n’en arriverait pas là. Les jeunes conducteurs de Jakarta ont certes porté un coup à l’image de l’Etat que nous devons tous protéger et pour cela ils ont tort sur toute la ligne vue la disproportionnalité de leur réaction mais faudrait pas que les autorités administratives en profitent pour corser l’exercice de ce métier pour les jeunes de Kolda. Ce dont ils ont besoin c’est d’être encadré, formé et sécurisé.

Que les préfets appellent leurs collègues de Kaolack et des autres villes pour voir comment ils ont procédé pour éviter d’autres erreurs car toute tentative de punition de ces jeunes serait un grave précédant et le fouladou n’a pas besoin de cela et comme le dit très souvent l’éminent historien NOUHA CISSE « il ne faut pas délocaliser la frustration », les jeunes de Kolda ont besoin d’avoir du travail, des lieux d’études et d’épanouissement et non pas qu’on leur exige ce qu’on a toléré pour les autres.

Bref ce qu’on attend des jeunes c’est le calme, la retenue et le respect que tout citoyen doit aux institutions et services qui représentent cet Etat garant de notre sécurité et aux représentants de cet Etat.

Nous attendons un « « Mieux d’Etat »,c’est-à-dire que leurs services améliorent leurs prestations à l’endroit des usagers, que l’Etat soit mieux présent à travers la qualité des services offerts par ses représentants à l’hôpital, à l’ecole,à la police (ce qui ne signifie nullement pour ce dernier le recours à la violence et la répression mais plutôt la dissuasion) et non à travers un « Plus d’Etat  » symbolisé par la violence et l’omniprésence des forces de l’ordre.

Moussa Thior

Un fils adoptif de Kolda