Emmanuel Macron a promis de désigner le successeur du Premier ministre actuel Michel Barnier avant jeudi, pourquoi a-t-il fait cette annonce ? Le président français s’est-il tiré une balle dans le pied?
À Paris, le président Macron a réuni hier tous les chefs de parti, à l’exclusion de ceux des Insoumis et du Rassemblement National. Il leur a promis de désigner le successeur de Michel Barnier dans les 48 heures. Entre-temps, le gouvernement démissionnaire déposera un projet de loi spécial permettant à l’État de collecter l’impôt en l’absence d’un budget. Emmanuel Macron a aussi souhaité que la prochaine équipe reste en place pendant 30 mois, jusqu’à la fin de son mandat. Est-ce que c’est bien raisonnable ?
Eh bien, j’aurais envie de vous répondre non. Mais sait-on jamais. Soyons clairs, le président ne s’est pas engagé formellement à ne pas dissoudre l’Assemblée nationale quand il en aura de nouveau la possibilité en juillet. Mais il a manifesté le désir de voir la situation politique se stabiliser sur le long terme et donc jusqu’au printemps 2027, quand il quittera ses fonctions.
Ne pas utiliser le 49.3
La réunion d’hier avait pour but de mettre d’accord les partis invités sur deux points. L’absence de censure contre le futur gouvernement et, en contrepartie, l’engagement par celui-ci à ne pas utiliser le célèbre article 49.3 pour faire passer en force certains de ses projets. En apparence, tous ceux qui se sont vus hier à l’Élysée semblaient approuver ces deux conditions. Pour autant, aucune coalition n’est sortie de cette rencontre. Les partis de gauche, notamment, continuent à réclamer le poste de Premier ministre pour l’un des leurs. Une ligne rouge aux yeux des Républicains qui, dans ce cas, ne participeraient pas au pouvoir.
Quant à François Bayrou, le chef des centristes, il est sorti ravi du parti présidentiel et continue, dur comme fer, à croire à ses chances. Il me fait un peu penser à ces cardinaux qui rentrent pape au conclave et, en sortent, cardinaux. Au Vatican, c’est l’Esprit Saint qui décide. À Paris, c’est le président et il est coutumier des annonces surprenantes. En revanche, il s’est un peu lié les mains en promettant un Premier ministre pour jeudi au plus tard. Ce faisant, il renonce à mener lui-même les négociations gouvernementales pour se limiter à un rôle d’arbitre comme le roi des Belges.
Pas de formateur
Le problème, c’est qu’en France, le statut de formateur n’existe pas. La personnalité nommée n’aura pas, comme Bart De Wever, le temps de constituer un accord de gouvernement, quitte à y passer plusieurs mois. Dès sa nomination, le successeur de Michel Barnier sera un Premier ministre de plein exercice. Et l’on attendra de lui, avec impatience, la constitution de son équipe et un discours de politique générale devant le Parlement.
Michel Barnier a vécu 15 jours et il a toujours dit que c’était trop court. Une des raisons de sa chute, c’est qu’au fond, les partis qui le soutenaient n’étaient pas sur la même ligne, et notamment concernant le budget, ce qui l’a obligé à recourir au 49.3 avec le résultat que l’on connaît. Certes, le nouveau locataire de Matignon pourra s’appuyer sur les bonnes intentions exprimées hier à l’Élysée. Mais comme disait ma grand-mère, l’enfer est pavé de bonnes intentions.