Des centaines de manifestants ont forcé une grille et se sont affrontés samedi matin aux services d’ordre à l’intérieur du Salon de l’agriculture à Paris, où le président français Emmanuel Macron est venu rencontrer les syndicats, avec l’intention de déambuler ensuite dans les allées.
« J’appelle tout le monde ici au calme », a déclaré le chef de l’État français, Emmanuel Macron, à la sortie d’un petit-déjeuner avec les syndicats, au cours duquel il a annoncé la création d’un « prix plancher » pour mieux rémunérer les agriculteurs, ainsi que des aides de trésorerie d’urgence. Emmanuel Macron n’a pas confirmé, pour des raisons de sécurité, s’il annulait ou maintenait sa déambulation prévue dans les allées du salon. « Je le dis pour tous les agriculteurs, vous n’aidez aucun de vos collègues en cassant des stands, vous n’aidez aucun de vos collègues en rendant le salon impossible et en quelque sorte en faisant peur aux familles d’y venir. C’est contreproductif », a commenté le président, qui a proposé de revoir les organisations syndicales dans trois semaines dans son palais de l’Élysée.
La 60e édition du Salon de l’agriculture en France a finalement ouvert ses portes au grand public avec une heure et demie de retard, à l’exception du pavillon principal investi par les manifestants, le plus couru où se trouvent vaches, cochons et chèvres. Le plus grand salon agricole de France doit accueillir 600.000 visiteurs sur neuf jours. Des dizaines puis des centaines de manifestants exaspérés sont entrés dans le Salon sans être fouillés une heure avant l’ouverture officielle. Parmi eux, des agriculteurs des principaux syndicats – la FNSEA, les Jeunes agriculteurs et la Coordination rurale – reconnaissables à leurs drapeaux et casquettes distinctives.
Souhaitant interpeller verbalement le président de la République, ils en sont venus aux mains avec le service d’ordre du salon qui tentait de leur barrer la route, selon des journalistes de l’AFP. De nombreux policiers ont ensuite été déployés à l’intérieur du salon et les manifestants ont pu être contenus, dans une ambiance de sifflets et huées assourdissants. « Macron démission! », « la chasse au Macron est ouverte! », « Il est où? » ont crié certains agriculteurs.
Quand Emmanuel Macron s’est exprimé devant la presse à la sortie de sa réunion avec les syndicats, des groupes se sont formés autour des téléphones pour écouter son intervention. « On n’a pas appris grand-chose mis à part un engagement sur les prix planchers, à déterminer en fonction du coût de production« , a déclaré à l’AFP Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, le syndicat altermondialiste.
Il s’agit selon les syndicats d’un nouvel engagement qui irait au-delà des lois actuelles françaises « Egalim » visant à garantir la rémunération des producteurs. « Y a rien, y a pas de date, y a pas d’écrit », a réagi Fabien Pitois, 24 ans, producteur de lait et volailles. « Si on ne fait rien là, l’élevage dans 10 ans, c’est terminé en France », redoute-t-il.
Les présidents français passent généralement des heures, voire la journée entière, au Salon, et les incidents ne sont pas inhabituels. Nicolas Sarkozy avait lancé « Casse-toi, alors, pauvre con! » en 2008 à un homme qui refusait de lui serrer la main. François Hollande s’était fait huer et insulter par des éleveurs en 2016.
La crise, qui couvait depuis l’automne, a explosé à partir du 18 janvier, menant à deux semaines de blocages d’autoroutes, finalement levés le 1er février. Les adhérents des syndicats majoritaires, surtout dans les grandes cultures céréalières, ont été furieux d’apprendre que la présidence française avait cité le collectif écologiste radical des Soulèvements de la Terre parmi les possibles participants à un « grand débat » samedi voulu par le président, finalement annulé devant la bronca.
Visiblement en colère, Emmanuel Macron a affirmé samedi n’avoir « jamais songé initier » une invitation à ce collectif qui s’était illustré en mars 2023 lors d’une journée d’affrontements très violents autour d’un chantier de réservoir artificiel d’eau et que le gouvernement a échoué à dissoudre.
Dans la foulée, dans un espace à l’écart, le président a finalement participé à un débat informel plus restreint avec des agriculteurs et des représentants des différentes organisations syndicales.