Préavis de grève, manifestations à Saint-Etienne et en région parisienne: les syndicats de Casino appellent à la mobilisation générale mardi depuis que le groupe en difficulté financière s’est dit prêt à céder des magasins à des concurrents.
« Casino et +Sainté+, ça dure depuis 125 ans », indiquent les cinq organisations représentatives du personnel (FO, CGT, CFDT, UNSA, CFE-CGC) dans leur appel à la mobilisation. « Sans votre solidarité, cela pourrait s’arrêter. »
Le groupe (Monoprix, Franprix, Pao de Acucar, Exito…), qui comptait encore fin 2022 200.000 salariés dont 50.000 en France, traverse de très fortes turbulences.
Il s’était accordé avec ses créanciers fin juillet sur une restructuration spectaculaire de son insoutenable endettement, accompagnée d’un changement d’actionnariat avec une prise de contrôle par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, le Français Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds britannique Attestor.
Le passage de témoin de celui qui est encore PDG et premier actionnaire du groupe, Jean-Charles Naouri, est prévu au premier trimestre 2024.
Mais en attendant, la situation économique de Casino ne s’améliore pas. Le groupe a dû se résoudre à étudier des « marques d’intérêt » de concurrents pour le rachat d’hypermarchés et de supermarchés.
– Concurrence accrue –
Le groupe n’a pas précisé quel périmètre était concerné, mais l’ensemble des magasins grands formats pourrait être vendu, selon des sources proches du dossier. De quoi faire craindre aux syndicats une « vente à la découpe ».
Les concurrents Auchan et Intermarché ont déposé une offre portant sur l’ensemble des magasins, a officiellement indiqué un représentant d’Auchan, Serge Papin, jeudi soir sur BFM Business. D’autres offres ont été déposées, non confirmées officiellement.
Malgré la situation critique de Casino, ses magasins suscitent des convoitises dans un secteur très concurrentiel où l’acquisition de nouveaux points de vente permet à un distributeur de gonfler ses parts de marché, une donnée cruciale.
Plus la part de marché est grande, moins le fournisseur agro-industriel peut se passer de ce distributeur et plus il est enclin à lui accorder de meilleures conditions de vente. Cette quête est d’autant plus effrénée à l’heure actuelle car le leader du secteur, E.Leclerc, connaît une croissance spectaculaire.
Intermarché a déjà conclu avec Casino le rachat de 119 magasins, plus une soixantaine en option, il y a quelques mois. Le N.3 du secteur en France (derrière Carrefour) doit reprendre les 4.000 salariés concernés, mais les syndicats craignent de connaître de moins bonnes conditions sociales que chez Casino.
– Siège et logistique –
Une cession plus massive aurait des conséquences sur les fonctions supports de Casino. Nathalie Devienne (FO), une des porte-paroles de l’intersyndicale, craint « pour les autres filiales, la logistique et les sièges sociaux ». Il semble improbable que les candidats à la reprise des magasins aient besoin de l’ensemble de la logistique de Casino.
A Saint-Etienne, où on « se souvient de la fin de Manufrance et de la Manufacture d’armes et des conséquences économiques », dixit l’intersyndicale, un rassemblement est prévu à partir de 09H00 devant le siège social, imposant paquebot où travaillent 2.000 personnes.
Est ensuite prévue une manifestation jusqu’à la préfecture et la mairie. Casino, fondé par Geoffroy Guichard qui a donné son nom au stade de football de l’AS Saint-Etienne, emploie environ 4.000 personnes dans la Loire.
Les élus du groupe municipal d’opposition PS et divers gauche de Saint-Etienne ont prévu de manifester « pour montrer leur attachement » au maintien de l’activité dans la région.
Quentin Bataillon, député Renaissance de la 1re circonscription de la Loire, y sera également, évoquant lundi auprès de l’AFP une situation « très inquiétante ».
Une manifestation est également prévue à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), où se trouve notamment le siège de Franprix. Environ 1.600 personnes y travaillent, selon la CFE-CGC.
Un préavis de grève a été déposé du 5 au 31 décembre par les syndicats, concernant « l’ensemble des salariés et des gérants du groupe ».
Mi-juillet, Bruno Le Maire avait signalé que « l’Etat (serait) vigilant sur l’emploi » et sur le maintien du « siège à Saint-Etienne ».
Auprès de l’AFP, un porte-parole du groupe EP du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky en France a assuré la semaine dernière être « attaché au maintien d’un siège à Saint-Etienne ».