jeudi, mars 28, 2024

Après la liquidation, un reclassement à inventer pour les 2.600 salariés de Camaieu

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« C’est très angoissant »: pour les 2.600 salariés laissés sur le carreau par la liquidation de Camaieu, une enseigne vieille de près de 40 ans, la course au reclassement s’engage dans l’inquiétude, malgré les promesses de l’État de les « accompagner ».

Parmi les salariés qui ont fondu en larmes ou laissé éclater leur colère à l’annonce de la liquidation mercredi au tribunal de commerce de Lille, beaucoup ont fait l’essentiel de leur carrière chez le géant du prêt-à-porter féminin, fondé en 1984 à Roubaix.

« C’est très angoissant de se dire qu’à 53 ans, il va falloir refaire un CV, repartir dans une recherche d’emploi », confie Sandra Sarrouy, vendeuse dans un magasin de Millau depuis 1993 et trésorière (CFDT) du CSE.

Elle envisage une reconversion: « à 53 ans, vous êtes moins décorative dans les magasins ». Mais « fragile sur l’informatique », elle devra se « mettre à niveau ».

Dans ce genre de grande enseigne, les formations suivies en interne ne favorisent pas toujours l’employabilité à l’externe, constate Mélanie Monton, du cabinet d’experts Syndex.

« D’un point de vue social, ça va être compliqué car le marché du prêt-à-porter est sous forte pression », pointe pour sa part Adrien Guérin, analyste chez Scope Ratings, pour qui les banqueroutes vont s’accélérer dans le secteur.

– Compliqué de « traverser la rue » –

Dès le couperet tombé, le ministre délégué à l’Industrie Roland Lescure s’est engagé à « accompagner les salariés ». Il a dit espérer des offres de reprise « qui pourraient être issues du processus de liquidation » pour une partie des activités.

Des reclassements pourraient aussi être envisagés au sein des autres enseignes de HBP – l’actionnaire de Camaieu qui l’avait repris en 2020 – parmi lesquelles GO Sport et la Grande Récré. La direction n’était pas joignable pour évoquer ces perspectives.

Les salariés de Camaieu se répartissent entre le siège et l’entrepôt roubaisiens (respectivement 350 et 112 employés, selon le CSE) et plus de 500 magasins dans toute la France.

Mme Sarrouy s’inquiète surtout pour ses collègues de l’entrepôt. Plus âgés, plus usés par le travail, « beaucoup pourront traverser toutes les rues qu’ils veulent, ce sera compliqué pour eux », pointe-t-elle, en référence à la phrase lancée à un chômeur par Emmanuel Macron.

« A l’entrepôt, plus de la moitié des salariés ont plus de 50 ans », confirme le délégué CGT Thierry Siwik. A cet âge-là, « même s’il y a des propositions d’emploi dans la logistique, vous êtes vite écarté ».

« Et au SMIC, si vous devez faire 40 km pour aller travailler, vous travaillez quasiment pour rien » avec le coût des carburants.

– Plan grands licenciements –

« Dans le cadre d’une liquidation, il y a peu d’argent à mettre dans le PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi, avec un volet reclassement, NDLR), donc les pouvoirs publics vont devoir s’investir », insiste Mélanie Monton.

La région Hauts-de-France, première frappée, a obtenu de l’État le déclenchement du « plan grands licenciements », un dispositif permettant de centraliser et coordonner la recherche d’emplois.

Une réunion doit se tenir « dans les plus brefs délais » avec syndicats, administrateurs judiciaires et acteurs du service public, « pour mener une étude au cas par cas de tous les salariés », explique le conseiller régional (UDI) Philippe Beauchamps.

Les emplois supprimés dans la région se concentrent en outre à Roubaix, une ville particulièrement frappée par le chômage, souligne-t-il.

Dans cette ancienne place-forte du textile français, 31,1% de la population active se déclaraient au chômage en 2019. Et dans le Nord, le taux de chômage dépassait de deux points la moyenne nationale au premier trimestre 2022, à 9,3%.

Le maire (DVD) Guillaume Delbar plaide pour un « plan spécifique » d’aide à l’emploi.

Parmi les pistes dans les Hauts-de-France, le secteur logistique, dont M. Beauchamps souligne les fortes demandes de recrutement. Mais reste « l’éternel problème de la mobilité » des salariés.

« J’imagine mal les conseillères de vente se repositionner sur les métiers de la logistique, compliqués en terme de pénibilité, d’horaires », commente l’experte Mélanie Monton.

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