jeudi, avril 18, 2024

Yémen: pour l’Aïd, les habitants assiégés de Taëz ne peuvent s’offrir que du poulet

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Dans la cour de sa modeste maison à Taëz, ville yéménite assiégée par les rebelles Houthis, Fadel al-Sbeï nourrit deux poules qui seront abattues mardi pour l’Aïd al-Adha, la grande fête musulmane du sacrifice, à la place du traditionnel mouton.

« La situation est extrêmement mauvaise. Je suis allé au marché pour acheter des animaux pour le sacrifice et tout était très cher », affirme à l’AFP ce père de six enfants, qui travaille comme livreur à moto et ne gagne pas plus de deux dollars par jour.

De nombreux Yéménites vivent comme lui dans une extrême pauvreté, dépendant de l’aide internationale, et à Taëz, dans le sud-ouest du pays, beaucoup sont revenus du marché à bestiaux les mains vides cette année, en raison des prix trop élevés en pleine dégringolade du riyal yéménite.

« Les moutons et les chèvres se vendent entre 150.000 riyals et 200.000 riyals (environ 150 à 200 dollars). J’ai dû acheter du poulet pour l’Aïd, c’est tout ce que je pouvais me permettre », se désole-t-il, précisant que la volaille ne coûtait que 20.000 riyals pièce.

« Même les vêtements sont extrêmement chers », ajoute ce père de famille, l’Aïd étant aussi une occasion pour offrir des habits et des cadeaux.

Dans les zones contrôlées par le gouvernement, le riyal a atteint en juillet son niveau le plus bas par rapport au dollar en plus de sept ans d’un conflit qui a dévasté le pays.

A certains endroits, le dollar s’échange à plus de 1.000 riyals, tandis que dans les zones contrôlées par les rebelles — la majeure partie du Nord dont la capitale Sanaa — le billet vert vaut environ 600 riyals.

– « Etat pitoyable » –

Assiégée par les rebelles depuis 2015, Taëz est l’une des villes les plus affectées par la guerre, déclenchée en 2014 par la prise de Sanaa par les rebelles Houthis.

Le conflit oppose les forces loyales au pouvoir, appuyées par une coalition militaire menée par l’Arabie saoudite, aux rebelles, soutenus par l’Iran. Il a fait des dizaines de milliers de morts, selon des organisations humanitaires, et des millions de déplacés.

Entourée de montagnes et habitée par environ 600.000 personnes, Taëz a été maintes fois bombardée par les rebelles.

En plus de subir le siège des Houthis, la ville est tiraillée en son sein entre des groupes rivaux et le gouvernement peine à y asseoir son pouvoir.

Selon le Programme alimentaire mondial, les prix des aliments ont triplé au Yémen depuis le début de la guerre et environ 50.000 personnes sont déjà touchées par la famine tandis que plus de cinq millions sont proches de l’être.

« Les prix sont fous, complètement fous », raconte à l’AFP Mohammed al-Sharaabi, se plaignant de la baisse du pouvoir d’achat des habitants de Taëz.

« Cette année, il est difficile d’acheter des animaux pour le sacrifice à cause de la crise étouffante et de la hausse du dollar et du riyal saoudien », poursuit-il.

L’économiste yéménite Salem al-Maqtari met en garde contre les « effets catastrophiques » de la chute du riyal yéménite: « C’est le citoyen qui en paiera le prix » si elle se poursuit.

A Taëz, les habitants en subissent déjà les conséquences: « On est dans un état pitoyable », conclut M. Sharaabi.

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