Les habitants de Mbacké ont marché, crié et ont brandi du rouge pour exprimer leur ras-le-bol contre une « eau saumâtre, trop salée et dangereuse » qui leur est servie depuis 30 ans.
« De mémoire d’homme, jamais une marche aussi populaire n’a été organisée, par le passé, dans la commune de Mbacké », murmure à notre oreille ce sexagénaire, foulard rouge autour du cou se dandinant derrière la foule. Il peine à suivre le rythme, mais ne s’empêche pas de répéter fort fébrilement le slogan « Ndox mu neex lanu beug ». Son chant est entrecoupé par une toux qui semble le fragiliser au fur et à mesure que le peloton avance. Son index de la main droite devra parcourir plusieurs fois son front pour arracher la sueur qui coule et qui pénètre dans ses yeux. Notre vieil homme ne veut pas rater cette manifestation qu’il attend depuis trente ans. Sa cadence ralentit puis reprend. Il est fatigué, mais il tient à boucler le trajet et son sourire qui laisse entrevoir des dents grillées par l’eau saumâtre le trahit. « Ça aussi, ça me fait mal », nous fait-il noter.
Lui comme ces centaines d’hommes, de femmes et de personnes du troisième âge ont d’un commun accord décidé de parcourir une partie de la ville pour atterrir devant le préfet Mamadou Lamine Mané. Leur désir c’est de marteler leur ras-le-bol de devoir encore se résoudre à boire de l’eau saumâtre, trop salée et, disent-ils, dangereuse pour la santé. Le calvaire dure depuis une trentaine d’années, dira Serigne May Seck, essoufflé. L’eau serait même nuisible aux arbres fruitiers et ornementaux. C’est Assane Ndiaye, le meilleur enseignant Sénégalais en 2018 qui le dit et qui déclare s’appesantir sur des études faites dans des laboratoires.
Au-delà des arguments pertinents décelables dans le discours, il y a surtout l’engagement avec lequel ces discours sont livrés. La marche qui était à l’initiative de Mbackois circonscrits dans une association dénommée « And sopi ndoxu Mbacké » a échoué devant l’exécutif local qui recevra le mémorandum à côté d’un responsable de la SDE.
La SDE ? Parlons-en ! Pour ce vendredi 16 août, l’entreprise aura passé une mauvaise journée. Les marcheurs l’auront, en effet, traité de tous les noms d’oiseaux l’accusant d’être la source de tous les maux qui gangrènent le quotidien des populations de la commune. Peut-être se défendra-t-elle.
En attendant, les manifestants promettent de revenir avec des méthodes de protestation beaucoup moins orthodoxes si rien n’est fait très prochainement.
DakarActu