samedi, avril 20, 2024

Rétrospection 2017 sur les grands changements politiques en Afrique de l’Ouest (Par Babacar Justin Ndiaye)

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La grande taille du continent, le nombre d’Etats (une demi-centaine), les crises récurrentes et les succès épars rendent difficile, un parfait balayage de l’année 2017. Impossible, dans une rétrospective, de tamiser tout le sable du Sahara-Sahel, de slalomer dans la savane herbeuse, de fouiller la forêt sous l’Equateur, d’escalader le Mont Kenya, pour surplomber puis photographier l’Afrique de l’Est, et enfin, d’ausculter l’Afrique australe. Contentons-nous, par conséquent, d’un ciblage des enjeux et des évènements qui ont donné, durant l’année 2017, des couleurs inquiétantes ou rassurantes, singulièrement en Afrique au sud du Sahara et plus exactement dans la sous-région ouest-africaine, en mettant l’accent sur des Etats dont les performances ou les contre-performances, la stabilité ou l’instabilité conditionnent d’une façon ou d’une autre, les lendemains politiques et sécuritaires du Sénégal. Décryptage et rétrospective qui révèlent une année bariolée – à l’image d’une peau de léopard – dans laquelle, d’encourageantes fulgurances (assez rares) côtoient des stagnations décourageantes et des reculs décevants (assez nombreux) dans beaucoup de domaines. Une conjoncture qui se love entre le crépuscule et la nuit, c’est-à-dire entre chien et loup ou entre faible espoir et grand désespoir.

En Afrique de l’Ouest, la page Yaya Jammeh, successivement tournée et arrachée par les urnes gambiennes et par les armes (pointées) des contingents de la CEDEAO (le dictateur s’est envolé le 21 janvier 2017, en direction de la Guinée-Conakry), l’aggravation des malheurs du Mali, les coups portés au Niger par les djihadistes à l’Ouest et les assaillants de Bokko Haram à l’Est, la vulnérabilité croissante du Burkina Faso, jusque dans sa capitale deux fois allumée par des terroristes, les mutineries mal matées et non éteintes en Côte d’Ivoire, et enfin, la panne politico-institutionnelle et son cortège de manifestations sans fin au Togo, ont été ou restent encore les points les plus cristallisants de périls. A côté de ses pays peu ou prou abonnés à la tourmente, figurent fort heureusement des Etats installés dans la paix aux frontières et dans le calme socio-politique ; nonobstant des signes voire des symptômes plus ou moins alarmants, notamment dans la gouvernance démocratique. Cas du Sénégal où l’actualité judiciaire est torrentielle. Les débats sont dé-fertilisés par des questions électorales non encore dépassées ou et, surtout, non encore résolues sur le terrain. Des dysfonctionnements effarants sont foisonnants. Quant à la paupérisation, elle est brillamment vaincue par les statistiques, théoriquement ralentie par les chiffres mais réellement pesante dans le vécu des populations.

Félicitons les îles du Cap-Vert qui restent, chaque année, scotchées aux avant-postes de la bonne gouvernance tous azimuts : politique, économique, électorale, sociale etc. ! Passons sur le Libéria qui qui se cale, avec un certain bonheur, sur les rails de la démocratie, après deux décennies de désordres démentiels. Une performance. Toutefois, des nuages s’amoncellent au-dessus de ce troisième processus de l’ère-post-Charles Taylor. Des sources ouest-africaines autorisées révèlent des manœuvres au niveau d’une poignée de chefs d’Etat de la CEDEAO (bien identifiés) qui souhaitent un renversement de vapeur – y compris au forceps – au profit de Joseph Boakaï, arrivé troisième derrière Georges Weah, à l’issue du premier tour. Il y a trois chefs d’Etat farouchement opposés à l’accession du footballeur, à la Présidence de la république. Signalons que Charles Brumsky (un « Congo » doublé d’un franc-maçon) n’a jamais supporté  la réalité et/ou la perspective d’un Libéria gouverné par des « natives » comme Samuel Doe ou Georges Weah. L’année 2017 sera décisive pour l’odyssée démocratique du Libéria post-Ellen Johnson Sirleaf. Non loin de là, la Guinée-Conakry est le théâtre d’une inquiétude grandissante autour de la Constitution claire, des discours flous et des desseins obscurs du Président Alpha Condé. Briguera-t-il un troisième ? En cette fin d’année 2017, la réponse officielle semble programmée pour 2018.

Bien entendu, le plat de résistance de la rétrospective dans la sous-région, c’est le Mali. Encore et toujours le Mali. En cette année 2017, l’opération « Barkhane » s’essouffle. L’opération secrète « Sabre » qui est menée en marge de « Barkhane » par les commandos du Commandement des Opérations Spéciales (COS), a également montré ses limites. Les djihadistes bombardent à l’arme lourde, la MINUSMA, en plein jour dans la ville de Kidal, attaquent l’armée nigérienne et ses encadreurs américains et déboulent dans le centre du Mali : région de Mopti. Malgré les escadrilles de chasseurs Mirage et les flottilles d’hélicoptères qui appuient les troupes. Panique réelle mais cachée à l’Elysée qui cogite et accouche de la trouvaille, en guise de parade : le G5 Sahel. Un « machin » militaire sahélien qui a ses faiblesses, ses vertus et ses vices. Et peu de forces.

D’abord, le G5 Sahel n’est pas né avec des capacités financières dans le berceau. Son budget fait l’objet d’une quête, jusqu’en Arabie Saoudite. Une réelle faiblesse. Ensuite, sa montée –  hypothétique – en puissance, permettra à Paris de retirer le gros de ses troupes au sol, d’alléger le fardeau trop pesant sur le contribuable dans l’Hexagone et, surtout, de garder Kidal dans l’escarcelle de la France, avec le minimum de soldats tricolores. Une grande vertu. Enfin, les cinq pays du Sahel dont les armées s’enliseront fatalement sur les trois fuseaux Ouest, Centre et Est correspondant aux zones frontalières Mali-Burkina, Niger-Burkina et Niger-Nigeria (la persistante menace de Bokko Haram) dépendront étroitement de la France, en matière de renseignements et d’équipements. Un premier vice.  Dans un tel schéma, la région de Mopti qui va grossièrement Ségou à Niafounké puis de Hombori à Bancasse-Bandiagara, sera totalement infiltrée et pourrie par les terroristes, notamment à la hauteur du Macina. Là se trouvent, en cette année 2017, la seconde perversion du G5 Sahel, le ventre mou du Mali et le talon d’Achille du Président IBK.

A une semaine de la fin de l’année 2017, le retour – longtemps non désiré par Bamako et maintenant fiévreusement accepté de l’ex-Président Amadou Toumani Touré – constitue un bon baromètre d’appréciation du contexte malien. Le virage à 180 degrés du Président IBK est dicté par des considérations, à la fois, de survie politique (besoin de deuxième mandat) et de sauvegarde nationale : le Mali est en équilibre ou sans équilibre au bord de l’abîme. En effet, Toumani Touré est une sorte de multicartes, une somme d’atouts précieux, au regard de la conjoncture. Un deal avec un ATT lassé d’exil (un exil n’est jamais doré) renforce, à coup sûr, un Président sortant au bilan calamiteux, face à une opposition pivotant autour de trois pôles d’inégales puissances mais globalement redoutables. En effet, la majorité actuelle autour du RPM de IBK – sans Moussa Mara ni une fraction de l’ADEMA fondée par l’ex-Président Konaré – aura du mal à endiguer un rouleau compresseur lourdement constitué par l’ex-patron de la Commission de l’UEMOA, Soumaïla Cissé et l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé.  A ces deux mastodontes, s’ajoute un élément nouveau, en l’occurrence, le Général de Brigade (démissionnaire des armées et candidat à la prochaine présidentielle) Moussa Sinko Coulibaly, bien côté par les notabilités de la ville de Ségou.

Dans cet arrangement au sommet, deux missions principales sont assignées à ATT. Bien qu’il n’ait jamais créé un Parti, ATT peut cristalliser sur sa personne, un massif élan de sympathie à l’échelle d’un pays qu’il a gouverné à deux reprises et au sein d’une armée qu’il a connue, commandée e…

Par Babacar Justin Ndiaye

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