jeudi, avril 25, 2024

Interview: selon Kadri Gürsel, une intervention d’Ankara en Syrie serait une « erreur fatale »

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En envoyant des troupes en Syrie, la Turquie commettrait une « erreur fatale », estime, en visite à Paris, Kadri Gürsel, analyste et journaliste d’opposition au régime du président Recep Tayyip Erdogan, auteur de « Turquie année zéro » (Editions du Cerf).

Q: La Turquie, pays de l’Otan, bombarde les positions des Kurdes de Syrie et évoque ouvertement l’éventualité d’une opération terrestre en Syrie avec l’Arabie saoudite ou ses autres alliés, ce qui pourrait la placer en confrontation directe avec les forces russes qui soutiennent l’armée syrienne. Comment la situation peut-elle évoluer ?

R: « Erdogan a très envie d’intervenir en Syrie. Il pense que son pays doit être présent sur le terrain, sinon il ne sera pas présent à la table des négociations, et sera écarté de l’évolution de la situation en Syrie.

Mais Erdogan est tombé dans le piège russe. En entrant en guerre (fin septembre) en Syrie pour sauver le régime de Bachar al-Assad, les Russes ont pensé qu’il leur fallait en même temps tenir à l’écart la Turquie. Par des provocations, ils ont forcé les Turcs à abattre un de leurs avions (fin novembre, à la frontière turco-syrienne), ce qui leur a permis ensuite d’interdire de fait tout l’espace aérien aux forces turques…

Dans ce contexte, une intervention terrestre turque en Syrie serait pour Erdogan une erreur fatale. Et aussi, l’armée turque serait obligée d’occuper le terrain et se trouverait en permanence face à des ennemis, les Kurdes: elle serait vite empêtrée dans un bourbier ».

Q: Quel est l’objectif principal du président Erdogan, dans le conflit syrien ?

R: « L’unique objectif d’Erdogan est de combattre les Kurdes du PKK en Turquie, et leurs alliés en Syrie, qui étendent actuellement leur territoire le long de la frontière turque.

Pour combattre les Kurdes de Syrie, la Turquie a utilisé les jihadistes comme un outil, en leur ouvrant sa frontière, en créant ce que j’ai appelé une autoroute du jihad. La Turquie a offert à l’Etat islamique son seul accès au monde extérieur. Mais le résultat de cette opération ‘portes ouvertes’, c’est d’avoir aidé les jihadistes à devenir une menace mondiale ».

Q: En 2009 puis 2012 pourtant, des négociations avaient démarré entre le pouvoir et le PKK, laissant espérer une solution à la question kurde en Turquie. Or le conflit a maintenant repris de plus belle. Que s’est-il passé ?

R: « Je n’ai jamais été convaincu par les démarches de l’équipe Erdogan pour trouver une solution au problème kurde. Dernier exemple: en juin, il a perdu la majorité absolue aux élections législatives, et avant les nouvelles élections qu’il a convoquées en novembre, et pour être sûr de remporter ce scrutin, il a choisi sciemment de relancer le conflit avec le PKK, laissant entendre que les Kurdes étaient seuls responsables de la dégradation de la situation. C’est un pompier pyromane.

Mais il n’y a pas de solution militaire au conflit kurde en Turquie, parce que la question kurde ne se limite pas au paysage politique turc. Les Kurdes ont une profondeur stratégique, ils sont installés dans plusieurs pays » -Turquie, Syrie, Irak, Iran-.

Propos recueillis par Michel SAILHAN.

Source: RTLInternational

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