samedi, avril 20, 2024

Déchets solides urbains à Dakar – La gestion pose toujours un problème

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Le déchet urbain, selon le dictionnaire de l’environnement, désigne un déchet produit par les communes. Il regroupe certains déchets des ménages, des artisans, des administrations et des petits commerces, dont la nature ou la composition fait qu’ils sont assimilables aux déchets des ménages. Aujourd’hui, la terminologie contemporaine associe invariablement le mot générique « assainissement » à la gestion des seules eaux usées et boues résiduaires, pour ainsi dire à la prise en charge des seuls rejets liquides ou fluides.

La gestion de ces déchets urbains se pose avec acuité. L’Etat du Sénégal à travers certains de ses services techniques (l’Office national d’assainissement du Sénégal (Onas) et l’entente Cadak/Car) travaillent d’arrache pieds pour débarrasser Dakar et sa banlieue de ses déchets solides et liquides.

Malgré ces efforts, les problèmes surviennent souvent entre les concessionnaires et l’Entente Cadak/Car. C’est le cas depuis 48 heures à Dakar, où les concessionnaires du nettoiement sont grève pour réclamer le paiement de leurs prestations. Là où l’Entente Cadak/Car dit leur avoir payé l’intégralité de leurs prestations à l’exception des prestations du mois d’avril 2015 dont les factures ont été déposées, dit-elle, au niveau de ses services le mardi 5 mai dernier. Pour comprendre comment fonctionne le secteur, Gfm.sn vous propose cette enquête (réactualisée) sur la gestion des ordures urbains à Dakar.

Etat des lieux. La gestion des déchets urbains et l’assainissement de manière générale constituent aujourd’hui un enjeu-clé pour le développement durable. En 2000, à l’occasion de la Conférence des Nations unies sur le Développement, le constat était amer : plus de la moitié de la population urbaine du Sénégal ne disposait pas d’installations d’assainissement adéquates.

Le visage qu’offre aujourd’hui Dakar et les grandes villes du Sénégal n’est pas joli à voir. Des tas d’immondices, des tas de gravats, des sachets en plastiques, les ordures ménagères servent de décor dans la plupart des villes du Sénégal. Cela, malgré les efforts consentis par l’Etat du Sénégal pour rendre Dakar et les villes du Sénégal propres et offrir aux populations un cadre de vie adéquat.

 Selon Madani Sy, Secrétaire général national du syndicat du nettoiement du Sénégal, depuis 1960 beaucoup de structures ont été créées, mais la gestion des déchets pose toujours problème.

La gestion des ordures est une chaîne. Elle passe par le ramassage, la collecte, le nettoiement, l’évacuation jusqu’à la décharge.

Malheureusement aujourd’hui, pour accéder à la décharge de Mbeubeuss, c’est la croix et la bannière. L’état de la route qui mène au plus grand dépotoir de la capitale n’est pas des meilleurs. Surtout pendant l’hivernage où les eaux stagnantes et les inondations rendent l’accès à la décharge de Mbeubeuss impossible.

En plus de son inaccessibilité, la décharge ne répond pas aux normes environnementales. Elle se trouve dans une zone marécageuse. La nappe phréatique est atteinte. Ce qui pose un sérieux problème environnemental.

Le manque de culture environnementale des populations n’aide pas parfois les techniciens de surface et les services de l’Onas dans leur travail de collecte des ordures et d’assainissement.

Pour faciliter une meilleure gestion des ordures, les populations doivent trier les ordures. Elles doivent séparer les ordures ménagères des ordures non ménagères, les ordures chimiques des ordures biochimiques, les ordures ménagères des gravats. L’absence de poubelles réglementaires pour les populations ne facilite pas également le travail des techniciens de surface.

Les fûts utilisés comme poubelle, souvent ouverts et renversés par les animaux en divagation qui déversent le contenu dans la rue, n’aident pas à un bon travail de collecte des ordures. Aussi les récupérateurs, appelés également « Bujuman » en wolof, qui emportent souvent les poubelles, posent un sérieux problème de sécurité.

 Statistiques. 1 800 tonnes par jour. Pour la région Dakaroise, si l’on se fie aux chiffres officiels concernant la production spécifique de la région dakaroise c’est-à-dire 1 200 tonnes par jour, la moyenne tournerait autour de 0,52 kg par jour et par personne.

Toutefois, en tenant compte des dernières données statistiques avérées (projections formulées par DIOP O dans son étude datant de 1988), la production en 2001 s’élèverait à 599 140 tonnes.

 Ramenée aux 2 267 356 habitants, que comptait la ville en 2002, on obtiendrait une moyenne d’environ 0,72 kg par jour et par habitant, soit près de 263 kg par an et par habitant pour la production spécifique. Ce chiffre n’incluait pas la production assimilable provenant des établissements commerciaux et administratifs, qui était pourtant prise en charge par la société de collecte au même titre que les déchets ménagers.

Mais, il semble davantage se rapprocher de la réalité que les 1 200 tonnes souvent avancées dans la littérature. Du fait de soupçons de sous-estimation de la production, il a été décidé d’actualiser l’étude sur la détermination de la production spécifique.

Des campagnes de pesées directement menées auprès de 360 ménages pendant 15 jours ont permis de dégager une estimation de la production domestique de près de 1726 tonnes/jour.

Ramenée aux 2 267 356 habitants que compte la région de Dakar (RGPH décembre 2002), elle donne une production spécifique domestique d’environ 0,76 kg par jour et par habitant. Aujourd’hui, ces chiffres ont connu une hausse.

 D’après le Secrétaire général national du syndicat du nettoiement du Sénégal, Madani Sy, aujourd’hui de Dakar à Yenne, avec ses 3 millions d’habitants, les techniciens de surface ramassent par jour 1 800 tonnes d’ordures par jour. Ce qui fait 480 000 tonnes l’année.

Aujourd’hui les concessionnaires sont payés à la tonne. Le concessionnaire Veolia était payé 47 000 F la tonne.

Dans le domaine de l’assainissement, faut-il le rappeler, en juin 2005, la lettre de politique sectorielle a fixé les objectifs de développement de l’assainissement à l’horizon 2015.

En 2012, selon des documents produits par la division Communication Institutionnelle et relation publique de de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas), dirigée par Mme Diouf Ndèye Maria Guèye, 63% de la population urbaine a accès à un assainissement adéquat et 35% des eaux usées sont traitées selon les normes. Ces résultats ont été obtenus grâce aux réalisations suivantes. 30 597 branchements au réseau collectif, soit un total de 103 136 branchements, 11 477 branchements au réseau semi-collectif, 45 047 systèmes autonomes appropriés correspondant à plus de 66 000 ouvrages individuels réalisés dans le cadre d’un programme spécifique (Paqpud) et un total général de 238 500 ouvrages autonomes en zone urbaine.

L’augmentation des capacités de traitement de deux stations, à Dakar (Cambérène) et Louga, et la construction de trois nouvelles stations d’épuration à Dakar (Shs, Niayes) et Thiès, assurant au total l’épuration de 31 135m°3/jour, la construction de trois stations de traitement des boues de vidanges à Dakar (2) et Rufisque (1).

Malgré ces importantes réalisations, de très grands efforts restent encore à faire sur une courte période. Pour les optimiser, la maîtrise de la chaîne de l’assainissement autonome et plus que jamais nécessaire si l’on sait qu’un litre de boue de vidange correspond à 50-100 litres d’eaux usées, et qu’un camion de vidange de 5m3 déversé en pleine nature est l’équivalent d’une population de 5 000 habitants déféquant à l’air libre.

Les trois stations de traitement des boues de vidanges réalisées à Dakar entre 2004 et 2006, victimes de leur succès, reçoivent entre 3 et 5 fois plus que le volume prévu. De plus, leur technologie et leur mode de gestion souffrent d’une absence de vision intégrée.

Au moment où le Sénégal traverse une grave crise énergétique et financière qui s’ajoute aux défis de santé publique dus au manque d’assainissement, les investissements consacrés pour ce secteur ne prennent pas encore suffisamment en compte l’opportunité avérée de transformer le « déchet » en valeur économique énergétiquement rentable.

Pourtant, il est prouvé que chaque dollar investi en assainissement génère un bénéfice net de 7 dollars, ce qui confirme que l’assainissement présente un impact économique substantiel. Aujourd’hui, la politique de l’assainissement doit être donc repensée pour s’adapter à la dynamique de croissance et à l’évolution des villes, mais aussi pour s’intégrer plus efficacement dans le tissu économique et social.

Organisation de la collecte. Pour couvrir tout le périmètre, la région de Dakar a été subdivisée en différentes zones. Chaque zone est gérée par un concessionnaire avec un cahier des charges. La fréquence F3 est le plus souvent utilisée c’est-à-dire les lundis, mercredis et vendredis ou les mardis, les jeudis et les samedis.

Dans les zones recevant du public, la fréquence F6 peut être appliquée (collecte pendant 6 jours sur 7). C’est le cas du marché Tilène. La collecte peut être nocturne ou diurne.

Une fois sur le domaine public, la prise en charge des déchets des populations de l’ensemble de la région dakaroise revient à AMA-Sénégal filiale de la maison- mère AMA Italie. C’est en effet à cette société que les autorités gouvernementales sénégalaises au terme d’un appel d’offres, avaient confié officiellement la gestion en monopole du marché du balayage, de la collecte et de l’évacuation vers la décharge de Mbeubeuss des…1200 tonnes officielles de déchets solides produits dans la région de Dakar.

La société avait découpé la région dakaroise en quatre départements : Dakar 1 & 2. Guédiawaye, Pikine, Rufisque – Bargny, départements qui à leur tour sont découpés en zones et en secteurs, alors que Gorée ne fait pas partie des attributions de AMA, les déchets de l’île étant directement gérés par la Municipalité.

Toutefois, AMA n’intervenait directement que dans les zones les plus urbanisées de la capitale, le reste de l’agglomération (hors zones rurales) est géré en sous-traitance par d’autres entreprises.

 Aujourd’hui, il y a 19 concessionnaires répartis sur toute l’étendue du territoire national. Ils n’ont pas de contrats officiels. Ils ont des contrats tacites révocables à tout moment.

Le budget pour rendre Dakar et sa banlieue propres s’élève à 13 milliards de Francs Cfa. La masse salariale des agents et techniciens de surface avoisine le milliard et les concessionnaires empochent 600 millions de Franc Cfa par mois. Ce qui fait 5 à 6 milliards l’année, plus a Tva qui fait presque 1 milliard 500 Francs Cfa l’année.

Avant, il y avait Veolia, qui était payée 210 millions Francs Cfa pour deux communes d’arrondissement, là où l’on payait à Ama Sénégal 410 millions de Francs Cfa pour les 19 communes d’arrondissement. Il y a un flou institutionnel autour de la gestion des ordures. Tantôt on disait que c’est le ministère de l’Environnement, tantôt le ministère de la Culture ou les collectivités locales, mais depuis le 15 décembre 2012, la gestion des ordures est confiée à nouveau à l’organisation intercommunautaire au niveau de la région de Dakar : la communauté des agglomérations de Dakar et la communauté des agglomérations de Rufisque. L’entente CADAK/CAR mise en place en février 2005.

 Impacts des déchets sur la population : La présence d’ordures ménagères, contenant surtout des composés organiques, présente une agression esthétique même en l’absence de fermentations. Ce phénomène constitue une agression visuelle et participe beaucoup à l’enlaidissement de nos villes. Les ordures ménagères contiennent des matières organiques putrescibles dont la fermentation entraîne la formation de gaz et de liquides malodorants et repoussants.

Le problème des déchets ménagers peut être à l’origine des maladies transmises de l’animal à l’homme. En effet, les résidus nutritifs des déchets ménagers attirent une faune visible ou pas dont certains microorganismes (virus, champignons, bactéries, etc.), les rats – vecteurs de la peste – les chiens et d’autres carnivores pouvant donner la rage.

Et pour ce qui est des invertébrés, on constate que les ordures ménagères constituent le principal vivier de divers insectes dont les mouches, cafards, moustiques, vecteurs de maladies comme les diarrhées, le choléra, le paludisme, etc. Il est à noter aussi l’existence de possibilités de transmission du VIH/Sida par la présence de déchets biomédicaux contaminés au niveau des poubelles (aiguilles, seringues, cotons, etc.).

Le brûlage des ordures ménagères entraîne des rejets de polluants organiques nocifs (particules respirables) à la santé des populations. L’enfouissement aussi peut polluer les eaux souterraines et l’homme se contamine en consommant quotidiennement l’eau provenant des nappes phréatiques.

Solution. Exit Mbeubeuss

Rencontré le mercredi 17 avril 2013 dans les locaux de l’Entente Cadak-Car sis à la Sicap Amitiés, Mamadou Lakhsan Cissé, responsable à cet institut chargé de la gestion des ordures à Dakar, a indiqué que beaucoup de réformes sont prises dans le secteur. Il y a de cela 15 à 16 mois, la gestion des ordures était confiée au ministère de la Culture et du cadre de vie.

Avec la deuxième alternance, la gestion a été confiée au ministre de l’Habitat, puis au ministère de l’Aménagement du territoire et des collectivités locales. Au mois de mars 2013, la gestion a été confiée officiellement à l’Entente Cadak-Car. Elle s’occupe toujours de la gestion des ordures à Dakar.

Il a aussi annoncé des mesures idoines qui ont été prises par les autorités pour régler de manière définitive la gestion des ordures ménagères à Dakar. C’est dans ce sens, dit-il, que des instructions fermes ont été données pour que la gestion des ordures épouse les contours de la bonne gouvernance. Ce qui fait que désormais il faut passer par un appel d’offres qui pourra dans un premier temps limiter les acteurs qui pourront graviter autour de la gestion des ordures, mais aussi pour avoir une gestion basée sur une obligation de résultats. Avec l’appel d’offres, il y aura selon M. Cissé, au maximum huit (8) concessionnaires.

La région de Dakar a été découpée en 8 zones. Ce qui fait qu’il se pourrait même qu’il y ait moins de 8 concessionnaires. Ainsi la prolifération des concessionnaires dans la gestion des ordures à Dakar sera résolue.

Autre mesure de taille arrêtée par les autorités, c’est la fermeture de la décharge de Mbeubeuss. L’Etat a identifié un autre site, en l’occurrence le site de Sindia à 50 km de Dakar : « Nous comptons procéder à la fermeture de Mbeubeuss ou à sa reconversion pour pouvoir dans un second temps faire fonctionner le centre d’enfouissement technique de Sindia », a confié M. Cissé lors de cet entretien. Puisque Mbeubeuss, explique-t-il, est une décharge sauvage non contrôlée qui n’obéissait à aucune norme.

Il rappelle au passage que Mbeubeuss était un lac qui a servi à recevoir des ordures. Cette décharge date des années 1968-70, et a coïncidé aux années des grandes sécheresses. C’est au moment où tous les lacs étaient pratiquement à sec que Mbeubeuss avait commencé à fonctionner. Maintenant, cela fait plus de 40 ans qu’elle fonctionne. II faudrait changer de stratégie.

A Sindia, il sera construit un centre d’enfouissement technique de classe 2. C’est-à-dire un centre d’enfouissement qui ne va récupérer que des ordures ménagères, déchets solides urbains. Il y a un centre de transfert et de tri qui est déjà réalisé à Mbao.

A ce niveau, il y aura un travail de balayage, de collecte, de transport, de tri et de mise en décharge. Les ordures seront au centre de transfert et de tri. Dans un premier temps, il sera procédé à un premier tri. Après il y a un résidu qui sera envoyé au centre d’enfouissement technique de Sindia.

Selon M. Cissé, le centre d’enfouissement de Sindia de type 2 répond aux normes internationales. Il a des casiers recouverts de géo membranes, avec des systèmes de lessivât qui vont être récupérés pour que ce lessivât n’atteigne pas la nappe phréatique.

Après 8 h de travail, il sera procédé au remblai. Au final, le centre d’enfouissement sera transformé en jardin ou en lieu de loisirs.

La nouvelle donne est que Dakar sera dotée d’un centre d’enfouissement technique et non d’une décharge sauvage à ciel ouvert.

Avec Igfm

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