vendredi, mars 29, 2024

Réflexions sur les orientations du Président de la République pour les années à venir : Rejeter nos naïvetés et faire face à Macky Sall

Ne ratez pas!

La question de la Casamance

Le 31 décembre 2012, le Président de la République a, dès l’abord de son discours, adressé la lancinante question de la Casamance annonçant, je le cite, « la poursuite du dialogue pour la résolution de la crise en Casamance ». Fin de citation.
Le 31 décembre2020, nulle part il n’a été fait mention de la Casamance.

La bonne gouvernance et la reddition des comptes

Le 31décembre 2012, Macky Sall indiquait ce qui suit : « J’ai engagé avec vous un contrat de confiance basé sur la bonne gouvernance. Ce contrat est en cours d’exécution et je compte le remplir fidèlement pour mettre le Sénégal nouveau en marche ».
« Tout comme la démocratie et le respect de l’Etat de droit, la gestion vertueuse des affaires publiques est, plus que jamais, une exigence citoyenne. C’est aussi un impératif économique absolu et une question d’équité et de justice sociale ».
J’ai mis en place un Office National Anti-corruption (OFNAC) doté de larges pouvoirs de saisine et d’investigation pour traduire en actes notre aspiration commune à une gestion saine, soucieuse de la sauvegarde de l’intérêt public. J’ai également instruit l’Inspection générale d’Etat de publier un rapport annuel sur l’état de la gouvernance publique ».
« Dans l’exercice de toute mission de service public, personne ne peut se soustraire de l’obligation de transparence et de rendre compte. Rien ne me détournera de l’objectif de bonne gouvernance. Par conséquent, toutes les procédures engagées en matière d’audits et d’enquêtes sur des ressources et biens mal acquis seront rigoureusement menées jusqu’à leur terme. Et la justice suivra son cours ». Fin de citation.

Ce passage sur la gouvernance et la reddition des comptes était sans doute le plus long de son discours du 31 décembre 2012. Qu’en a-t-il été le 31décembre 2020 ? le mot ‘gouvernance’ lui-même n’apparaît nulle part dans le discours. La gestion vertueuse des affaires publiques n’est plus une exigence citoyenne si jamais elle l’a été. L’OFNAC doté de larges pouvoirs de saisine n’est plus que l’ombre de lui-même depuis fort longtemps non pas par la faute des fonctionnaires qui y travaillent, mais parce que les dossiers transmis au procureur sont rangés dans les tiroirs de l’oubli. Les rapports de l’Inspection Général d’Etat qui devaient être publiés annuellement ne le sont pas.
En fait, le contrat de confiance si pompeusement et si solennellement annoncé le soir du 31 décembre 2012 a été rompu (si jamais il avait été scellé) dès que l’objectif sous-jacent a été réalisé à savoir mettre Karim Meïssa Wade hors d’état de nuire. Une vaste comédie dans laquelle d’honnêtes citoyens de tous bords politiques et sans appartenance politique ont été massivement emballés et embarqués.

Il nous rejouera le même coup avec Khalifa Ababacar Sall maire de Dakar. En effet, dès 2013, ce dernier a été publiquement et formellement interpellé et sommé de rallier le camp présidentiel avec armes et bagages sous peine de se voir chassé de la mairie à l’élection suivante. Khalifa Sall a résisté et les a battus sans appel aux élections locales de 2014 mettant ainsi fortement en question un second mandat pour le Président de la République dans une élection sincère et démocratique. Ce fut donc l’assaut final contre le maire de la Ville de Dakar accusé de malversations, envoyé en prison. Elu député malgré tout en 2017, son immunité parlementaire a été levée en violation de toutes les lois de la République et sa déchéance par décret du Président de la République de son mandat de maire de Dakar actée.

On annonce encore aujourd’hui l’activation de corps de contrôle de l’Etat contre d’anciens hauts responsables et proches du Président de la République. Pour quel crime ? Pour crime d’ambition politique.

La référence pour perdurer dans le système Sall n’est donc pas le respect de l’éthique de gestion. Qui fera-t-on croire que la gestion calamiteuse de ce directeur général récemment débarqué d’un établissement public bien connu était méconnue ? c’est comme les accords de pêche, les licences de pêche, comme le foncier, comme le pétrole, comme le gaz et que sais-je.

Comment peut-on espérer obtenir un quelconque développement avec une gestion aussi scabreuse ? Une agriculture délaissée où l’expression ‘’autosuffisance alimentaire’’ a disparu du vocabulaire depuis trois (3) ans ; un secteur de la pêche et un secteur de l’élevage à l’abandon, un artisanat plombé par la concurrence étrangère déloyale. Une industrie déstructurée, incapable de transformer nos produits primaires et j’en passe …

Bien sûr que tout cela est très clair pour la majorité des Sénégalais. Et s’il se trouve malgré tout quelques attardés pour ne pas comprendre, le Président s’en est personnellement chargé le 31 décembre dans sa conférence de presse.

Il nous explique à haute et intelligible voix que les rapports des corps de contrôle lui sont destinés et qu’il en fait ce qu’il veut ce en quoi il a totalement tort d’ailleurs au regard de la loi. Le premier magistrat sur qui pèse l’obligation de rendre compte est le Président de la République selon la loi. La loi ? Quelle loi ? Au Sénégal, Macky Sall est devenu lui-même la loi. Macky Sall est devenu lui-même l’Etat. La meilleure preuve en a été administrée par l’intéressé en personne : Il y a dit-il des citoyens sur lesquels la loi ne peut pas s’appliquer. En somme le Sénégal n’est plus un Etat de droit mais un Etat Macky.

Qu’a-t-il répondu à la question sur l’introduction de l’éducation LGBT à l’école ? « tant que je serai là ça ne se fera pas ». Une partie de la presse a trop vite parlé de réaction ferme et de débat qui serait clôt par le Président de la République. Cette partie de la presse a tout faux ! Qui a introduit ce projet de l’UNESCO au Sénégal ? des séminaires sont organisés et des enseignants y prennent part ; à quel titre ? qui délivre les ordres de mission ? Personne, bien sûr, ne répondra à ces questions. Jusqu’à la plus prochaine alerte et on nous servira la même réponse. Entre temps, ils surveilleront le rapport de force comme le lait sur le feu, prêts à légiférer en vitesse dès que les conditions le permettront.

Le projet de loi sur l’état d’urgence et la mise en place de l’Etat-parti.

Le Président de la République se prépare à passer tous ses projets en force, dans les années qui nous séparent de 2024, exactement comme il l’a fait à la veille de l’élection présidentielle de 2019 lorsqu’il a choisi d’éliminer des candidats dangereux à cette élection.

Le projet de loi sur l’état d’urgence qui sera examiné ce lundi au parlement entre pleinement dans ce cadre. Un tel projet participe du processus de parachèvement de l’Etat-parti. Dès lors que le parti présidentiel et la coalition au pouvoir ne seront pas capables de faire face demain à la défiance populaire, il ne lui restera que l’Etat pour s’imposer. Le parlement et la justice déjà si malmenés et si humiliés, se verront définitivement mis à nu. Tout sera régi à partir du Président de la République qui distribuera les rôles entre lui-même et ses ministres, ses gouverneurs, ses préfets et sous-préfets selon les circonstances. Ceux-ci auront désormais les pleins pouvoirs pour agir en marge de la loi et à l’abri de la justice.

Evidemment tous les démocrates du pays, tous ceux qui sont épris de justice, de paix et de stabilité pour ce pays sont contre ce projet funeste du pouvoir et l’avenir nous donnera raison car le dernier mot reviendra en toutes circonstances au peuple.

Au vu de ce qui précède, il n’y a plus place pour détourner le regard ou se boucher les oreilles. Il est question désormais de choisir sa voie. Ceux qui rejettent la politique en cours ne peuvent plus remettre à plus tard leur engagement pour enfin que ce pays, cette nation, ce peuple recouvrent la dignité et l’émancipation. Les récriminations et les lamentations ne suffiront pas. Il faut un travail opiniâtre, de jour comme de nuit, pour déconstruire au sein des populations le discours de manipulation et d’aliénation du pouvoir de façon qu’elles s’organisent et renvoient aux oubliettes de l’histoire ce régime de prédation.

Baisser la tête en invoquant Le Tout Puissant pour qu’Il vienne par Lui-même nous sauver de l’humiliation n’est pas la solution. Il nous faut rejeter nos naïvetés et nous prépare à la résistance.

Mamadou Diop ‘Decroix’
Député à l’Assemblée nationale
Secrétaire général d’And-Jëf/Pads

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.

Articles récents

Notre sélection pour vous